INFORMATIONS EN JAPONAIS : ぎこちなさ
GIKOCHINA-SA / ぎこちなさ est une pièce qui scintille entre deux mondes. Deux cultures de corps aussi éloignées que fascinantes l’une à l’autre. Le Japon. Le monde occidental. Chorégraphe, Mylène Benoit est tout autant plasticienne, vidéaste. L’image du corps est sa passion. Soit un dépassement du concret massif de la matière. Mais tout autant un refus de se réduire dans un aplat à deux dimensions.
Sa recherche, insolite, s’est d’abord consacrée aux dyskinésies. Il s’agit des mouvements involontaires, heurtés, qu’on observe, par exemple et entre autres, chez des personnes atteintes de Parkinson. Faut-il n’y voir qu’un désolant désordre ? Ou y déceler l’amorce d’une autre qualité, peu soupçonnée, de langage corporel ? Cette exploration magnifiquement travaillée avec la danseuse Célia Gondol, elle aussi plasticienne, s’est développée sur une somptueuse musique de matières électroniques, par Nicolas Devos et Pénélope Michel en live.
Mylène Benoit a également séjourné au Japon, qu’elle découvrit alors, d’un œil intégralement neuf. Tout l’y a bouleversée, dans une écriture des gestes, codifiée à l’extrême, vouée à un raffinement de tous les instants. Elle y a rencontré le danseur contemporain Atsushi Heki, également expert dans l’interprétation la plus rigoureuse et scrupuleuse du noble répertoire ancestral du Nichibu. Avec lui, allait s’expérimenter la démarche inverse, qui part d’un langage gestuel ordonné à l’extrême, pour s’y autoriser un chahut progressif de prises de liberté.
Du désordre à la rigueur, et réciproquement : GIKOCHINA-SA / ぎこちなさ effectue, jusqu’à l’envoûtement, un chemin qui renouvelle encore les significations contradictoires, et jamais épuisées, du corps en mouvement.
– Gérard Mayen